Appropriation ou appréciation : on en parle avec MINI TIPI

Appropriation ou appréciation : on en parle avec MINI TIPI

  • 16 octobre, 2024

Imaginez une pièce pleine à craquer de douces couvertures arborant de jolis motifs autochtones. Imaginez aussi que s’y trouvent les fondatrices de l’entreprise MINI TIPITrishaPitura, membre de la Première Nation de Nipissing, et MélanieBernard, originaire de la ville de Québec et de descendance canadienne-française — en plus d’une rédactrice et d’une photographe. Après une visite de l’atelier (et bien des exclamations sur la beauté de ce qui s’y trouve), une question est soulevée : quelle est la différence entre appropriation culturelle et appréciation culturelle? Installées parmi les couvertures Village qui remplissent la pièce, les copropriétaires répondent à notre question.

«Bon nombre de personnes autochtones se sentent représentées quand elles voient nos motifs dans des espaces urbains. Il ny a pas si longtemps, c’était encore mal vu daffirmer nos origines. Cette représentation peut compter grandement pour une personne. Pour les Autochtones, la visibilité de lart et des artistes autochtones est un signe de reconnaissance.»

Lire sur notre visite de l’atelier de MINI TIPI

 

La différence entre appropriation culturelle et appréciation culturelle

« Bien des non-autochtones pensent que notre culture est belle, mais souvent, il y a de l’incertitude par rapport à ce qui est acceptable de porter ou non », explique Trisha, qui est aux côtés de Mélanie, portant toutes deux de splendides boucles d’oreilles perlées. 

La beauté de l’art autochtone authentique n’est pas un secret, alors, quand les gens demandent à Trisha s’il est convenable d’en posséder, elle répond : « C’est une bonne question. Tant que cela est fait de la bonne manière, je crois que tout le monde peut en profiter. Il faut toutefois comprendre que l’inauthenticité et l’appropriation peuvent avoir un impact économique considérable sur les artistes et les communautés. Néanmoins, quand les gens aiment réellement l’art et l’achètent avec sincérité, ils peuvent comprendre l’importance du soutien aux entreprises autochtones et la différence qu’ils font. »

intricate and beaded earrings

L’économie dans la communauté

Trisha, passionnée par le sujet, continue pour mieux nous faire comprendre comment apprécier l’art sans se l’approprier. « La clé est de s’informer. Il y a tellement de copies ou de pièces “inspirées de” l’art autochtone. Il faut faire vos recherches, vous assurer de savoir qui est l’artiste. Une fois renseignés, vous pouvez en parler et informer les autres. Qui est l’artiste derrière ce bijou? De quelle communauté est l’artiste? Il y a tant de connaissances et de traditions transmises par le biais de l’art authentique. Qui encourages-tu? Il faut pouvoir répondre à ces questions pour vraiment apprécier. »

En toute transparence, Mélanie raconte que dans leurs débuts, ce sont des motifs génériques qui étaient utilisés. Même si l’entreprise florissait, les cofondatrices ont pris conscience qu’il était impossible de trouver l’artiste derrière les textiles choisis, probablement parce qu’il s’agissait de motifs inauthentiques. Elles ne souhaitaient pas continuer ainsi. C’est pourquoi MINI TIPI déploie tant d’effort pour offrir des motifs autochtones authentiques et collaborer avec des artistes incroyables, pour leur offrir une plateforme et même des redevances chaque fois qu’un article arborant leur art est vendu.

Lire notre blogue sur la collection d’automne

Elle poursuit : « La réconciliation économique est vitale, mais souvent oubliée. Bien sûr, l’éducation est essentielle, mais le côté économique est tout aussi important, c’est le gagne-pain. Nous tentons d’inciter les gens à apprécier l’art autochtone et d’aider les communautés en éduquant nos clients et en présentant de la diversité sur notre site Web; nous voulons montrer que l’art autochtone est accessible à tout le monde, peu importe leur origine. Trisha ajoute : « C’est un cycle, les retombées vont à la communauté et aux prochaines générations. Le soutien aux entreprises autochtones a beaucoup plus de répercussions qu’on pourrait le penser. »

 

L’appréciation est accessible

L’une des missions de MINI TIPI est de rendre accessible l’art authentique autochtone pour que tout le monde puisse en profiter. « Vous pouvez engager une conversation très importante, juste parce que vous portez un bijou ou un vêtement authentique », explique Trisha.

« Auparavant, les gens pouvaient dire qu’ils ne connaissaient aucune entreprise autochtone; maintenant elles sont difficiles à ignorer », nous dit Mélanie. Elle se souvient d’une de ses publications sur LinkedIn l’an dernier : elle avait mis les internautes au défi d’acheter au moins un cadeau autochtone pour Noël. « Sur les réseaux sociaux, on ne sait jamais qui va nous lire. Après la publication, les gens m’ont dit à quel point je les avais inspirés et comment ils avaient fait l’effort de trouver un cadeau authentique pour une personne chère, chez MINI TIPI ou ailleurs. » 

Au Canada, il y a plus de 65 000 entreprises autochtones, que ce soit un café, une bijouterie, un salon de coiffure ou un atelier de sérigraphie! « Il y a tellement d’organismes autochtones et de façons de les soutenir. »

La communauté de MINI TIPI apprécie l’entreprise et lui est fidèle, car les fondatrices sont réellement engagées. Les filles rédigent des blogues, se font connaître (elles sont même parues à l’émission Dans l’œil du dragon!), elles parlent avec leur cœur et elles sont impliquées de façon directe et tangible dans la communauté. Qui plus est, elles invitent les autres à faire de même. « Les gens aiment l’authenticité. La représentation est chère aux peuples autochtones, mais il faut aussi inciter les non-autochtones à faire des choix éclairés. »

Trisha Pitura and Melanie Bernard

Le sentiment d’appréciation

La dernière fois que nous nous sommes entretenus avec Mélanie et Trisha, elles étaient sur le point de partir vers Montréal pour participer à la Semaine Mode. L’excitation était palpable. Avec six autres compagnies autochtones, le Collectif Autochtone a vu le jour. Elles nous ont parlé des conférences et des défilés qui les attendaient et qui allaient rendre la mode autochtone plus visible. « C’est la première fois qu’il y a un espace autochtone à la Semaine Mode », dit Mélanie avec enthousiasme.

L’événement était salle comble des semaines d’avance. Une salle pleine de personnes prêtes à être témoins de l’histoire, à apprendre et à apprécier. « Il y aura toujours une première, ce n’est qu’un début. » Avec le succès retentissant de l’événement, ce ne sera assurément pas leur dernière présence. La chaîne CBC l’exprime bien, les Premières Nations sont la vedette des défilés cette année à Montréal (article en anglais).

 

Le Nordik dans tout ça

« Nous avons décidé de collaborer avec le groupe Nordik, car il cherchait à tisser des liens avec une entreprise autochtone locale détenue par des femmes. Le Nordik a vu ce que nous faisions et nous a approchés en souhaitant bâtir une relation et faire une différence », se rappelle Trisha à propos des débuts entre les deux entreprises. « C’est une relation fondée sur le désir de montrer l’exemple et de construire des ponts vers la réconciliation. Le Nordik est un chef de file et nous espérons que notre collaboration inspirera d’autres entreprises aussi. » Mélanie termine sur ces mots : « depuis le début de son existence, le Nordik est un leader sur plusieurs plans et il le restera bien longtemps encore. »

 

Bref, l’appréciation se résume à être sincères dans nos choix et nos actions.

seamstress next to a Village Blanket

Lire la réflexion de MINI TIPI sur l’appropriation et l’appréciation